
Filouteries et menaces, les commerçants de la Comédie en ont
ras-le-bol. © D.R
Sur la place de la Comédie à Montpellier, les professionnels dénoncent filouteries et menaces.
Certains n'y vont pas par quatre chemins. "On n'arrête pas de faire la police alors que ce n'est pas notre travail. Mais comme la police, municipale comme nationale, n'est pas toujours là, on va créer une milice et faire nous-même le travail", lâchent, excédés, certains commerçants de la place de la Comédie. Qu'ils soient sédentaires, comme les brasseurs et restaurateurs, ou non sédentaires, comme ceux du marché, ils affichent leur ras-le-bol de l'agressivité de quelques sans domicile fixe accompagnés de chiens mais plus encore envers certaines personnes de la communauté rom. Avec, selon les uns et les autres, plus ou moins de force dans le propos.
"Ils agacent tout le monde, lâche Ludovic Chopineaux, gérant depuis deux ans de la guinguette Vert Tomate, sur l'Esplanade. Ce n'est pas bon pour l'image de la ville et du tourisme. Un jour, ça va mal finir." Un peu plus loin, sur la place, le commentaire est le même. "Certains jeunes n'hésitent pas à voler le pourboire ou l'addition laissée sur la table par le client quand il n'a pas le temps d'attendre que le serveur vienne encaisser. Et quand on leur demande de partir, ils nous menacent", racontent les gérants de la Grande Brasserie. "Il semble flotter un sentiment d'impunité", ajoutent-ils. De l'autre côté de la place, à la brasserie des Trois Grâces, le gérant préfère parler, lui, de "filouterie et de comportements malins". "Parfois, ils vont jusqu'à bousculer le serveur pour faire tomber le plateau et ramasser des pièces. Ce n'est pas forcément méchant mais ça nous pousse à être vigilants."Sur le marché de la Comédie, on se pose en observateurs privilégiés de la vie sur la place. "Ils accostent souvent des gens type premier de la classe. Des gens qui ne savent pas se défendre, des jeunes qui se font avoir", lâche André Limongi. Il enchaîne : "Ils sont parfois arrivés à un point où la place entière leur appartient, ce sont des conquérants."
La CCI réagit à son tour en adressant une lettre à la mairie
André Deljarry, président de la chambre de commerce et d’industrie de Montpellier, vient d’adresser à Philippe Saurel, maire de Montpellier, un courrier dans laquelle il l’interpelle sur la question de la sécurité des commerçants en centre-ville. « Des jeunes gens entrent dans les boutiques pour faire signer des pétitions et, en cas de refus, se montrent agressifs », écrit-il. Ajoutant : « De plus, ils commettent des vols dans les magasins mais également à l’encontre de la clientèle. » Il fait observer que « ces faits génèrent des situations qui perturbent fortement l’activité des commerces et créent un climat d’insécurité ». Il demande que « le nécessaire soit fait pour que ces pratiques cessent ».
"L'idée d'une milice est envisageable"
Président du syndicat des halles et marchés, installé lui aussi sur la place de la Comédie, Jean-Pierre Touchat ne décolère pas. "Combien de fois on les voit arnaquer de simples gens qui leur donnent une pièce en ouvrant leur portefeuille ? Ils ne se gênent pas, ils piquent directement dedans. J'ai alerté la mairie et la police nationale de ce qui se passe. Ils le savent bien. Mais s'ils ne font rien, l'idée d'une milice pour mettre de l'ordre peut devenir envisageable", menace-t-il."Ces gens profitent d'un vide juridique", note André Limongi. "On comprend que la police soit impuissante face à ça !", ajoute Ludovic Chopineaux.
Interrogé par Midi Libre, Philippe Saurel, maire de Montpellier, reste inflexible sur l'éventuelle création de milice. "Nous sommes dans un pays de droit. Je condamne formellement", répond-il. À la mairie, le problème de la mendicité agressive est connu. Le comble : les plaintes de ces touristes qui se font dépouiller au sein même de l'office de tourisme, la vitrine de Montpellier.
ENTRETIEN : "Une preuve d’exaspération"

Marie-Hélène Santarelli, adjointe au maire en charge de la sécurité.
La Ville a-t-elle été saisie des problèmes de mendicité agressive ?
Ces problèmes sont connus. L’office de tourisme nous a notamment saisis de nombreuses plaintes de touristes qui se font dérober leurs affaires à l’intérieur de ses locaux.
Comment agir ?
La seule solution, c’est de faire intervenir la police municipale, qu’elle soit présente sur la Comédie. Elle a l’obligation de faire respecter l’arrêté municipal pris récemment sur la tranquillité publique. Le problème vient de bandes de SDF avec chiens et de jeunes Roms aux arrêts de tramway notamment. Les commerçants peuvent appeler la police municipale, sachant que celle-ci ne peut pas être partout.
Comment réagissez-vous à la menace d’une milice ?
La solution sécuritaire ne peut passer par une justice personnelle, quel que soit le problème. La volonté de créer une sorte de milice est une preuve d’exaspération mais elle ne peut être considérée comme une preuve d’efficacité. Pour autant, nous ne nions pas le problème, nous le constatons comme chaque citoyen. C’est pourquoi, je les invite, lorsque de tels problèmes surgissent, à appeler le commandement de la police municipale. Cependant, je fais remarquer qu’aucun commerçant n’a pris de rendez-vous avec moi pour aborder ce problème.
KARIM MAOUDJ
source : Midi Libre